Élaborée à partir de la recette médiévale d’un couvent florentin, l’Eau de Cologne est d’abord présentée par son créateur comme un remède plutôt qu’une fragrance cosmétique. Une considération parfaitement naturelle au XVIIIe et XIXe siècle qui trouve écho dans notre emploi contemporain des huiles essentielles.


L’Eau de Cologne : la panacée du XIXe siècle

L’ « Acqua Mirabilis » comme elle fut d’abord nommée rencontra rapidement le succès car il était entendu qu’elle portait bien son nom. Lorsqu’elle fut commercialisée en France sous le terme d’ « Eau Admirable » par Jean-Marie Farina (1685 – 1766), ce dernier ne fut pas avare de détails en annonçant tout de go dans un prospectus du XVIIIe siècle que « si l’on voulait faire le détail de tous les maux auxquels cette Eau est propre, il faudrait faire celui de toutes les infirmités auxquelles le corps humain est sujet. » Voilà un postulat qui ne manque pas de panache ni de témérité. Et Farina de continuer en énumérant les divers affections dont l’Eau de Cologne venait à bout : apoplexie, migraine, douleur des yeux, scorbut, goutte, coupures et écorchures, paralysie et ce aussi bien sur l’homme que l’animal ! On y apprend également les différentes manières au XIXe siècle d’utiliser cette Eau : l’ingérer en versant quelques gouttes dans du vin ou du bouillon, l’appliquer en compresse sur du coton humide et surtout s’en frictionner le corps régulièrement et en particulier au sortir du bain « dans le temps que les pores sont ouverts ».

Salle de bain de Napoléon au Palazzo Pitti à Florence. Installée à sa demande, elle place la baignoire au centre de la pièce dans un goût néoclassique typique du XIXe siècle
Salle de bain de Napoléon au Palazzo Pitti à Florence. Installée à sa demande, elle place la baignoire au centre de la pièce dans un goût néoclassique typique du XIXe siècle - © ashleyhicks1970 (Instagram)

La fraîcheur qu’elle procurait et les actifs qui la composaient apportaient sans aucun doute un soulagement immédiat à quiconque s’en servait mais peut-être Farina se montrait-il un peu trop confiant en affirmant que son Eau, aussi délicieuse soit-elle, venait à bout de tous les maux. Par ailleurs l’Eau de Cologne n’entrait plus dans la catégorie des médicaments depuis le décret du 18 août 1810, ce qui ne devait pas déplaire à l’Empereur qui, selon Emmanuel de Las Cases (1766 – 1842), « ne [croyait] point à la médecine, ni à ses remèdes, dont il ne [faisait] aucun usage […] Il défend[ait] la thèse selon laquelle il est préférable de laisser faire la nature au lieu de l’encombrer de remèdes ». Pourtant, l’Eau de Cologne est bien le fruit d’une réflexion pharmacologique et médicale.

Prospectus datant de 1811 et vantant les mérites de l’Eau de Cologne.
Prospectus datant de 1811 et vantant les mérites de l’Eau de Cologne. Alors qu’elle ne peut plus être présentée comme un médicament, Farina insiste sur ses atouts cosmétiques et enjoint le public à se méfier des contrefaçons de son Eau qui ne sauraient posséder les mêmes qualités que l’originale - © Wikipedia

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L’Eau de Cologne : la médecine avant la cosmétique.

Au Moyen-Âge et jusqu’au début de l’époque Moderne, la qualité de l’air (sec, humide, froid ou chaud) était jugée seule responsable des maladies. Les parfums et senteurs des aromates, fleurs et herbes étaient destinés à équilibrer le corps : à chaque qualité d’air correspondaient des assemblages de senteurs propres à prévenir les maladies. Portés dans des pommes de senteurs ou mélangés à du vinaigre, aromates, écorces, fleurs et herbes odoriférantes étaient considérées comme des remèdes avant d’être envisagés comme des cosmétiques. L’utilisation de l’Eau de Cologne hérite de cette tradition de par les riches actifs thérapeutiques qui la composent. Formulée à partir d’huiles essentielles naturelles, elle n’est pas éloignée de nos pratiques contemporaines d’aromathérapie.